Crise diplomatique : Paris expulse douze diplomates algériens et rappelle son ambassadeur​

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En réaction à l’expulsion de douze agents français par Alger, la France a annoncé mardi des mesures de rétorsion. Un nouvel épisode dans une relation bilatérale fragile, sur fond d’affaire judiciaire sensible.

L’escalade diplomatique est désormais officielle. Mardi 15 avril, Paris a annoncé l’expulsion de douze agents diplomatiques algériens et le rappel pour consultations de son ambassadeur à Alger, Stéphane Romatet. Cette décision intervient 48 heures après qu’Alger a, de son côté, expulsé douze agents français. En toile de fond : l’arrestation en région parisienne d’un agent consulaire algérien soupçonné d’avoir participé à l’enlèvement d’un opposant au régime.

« Cette décision unilatérale et brutale des autorités algériennes ne saurait rester sans réponse », a fait savoir l’Élysée dans un communiqué. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a jugé que « le respect des conventions diplomatiques est un pilier du dialogue entre États souverains. »

Un enlèvement d’opposant qui ravive les tensions

L’origine de cette crise diplomatique remonte au 8 avril, lorsque les services antiterroristes français ont procédé à l’interpellation de trois individus, dont un diplomate du consulat algérien de Créteil, dans le cadre d’une enquête pour « enlèvement et séquestration en bande organisée ». La victime présumée : Amir Boukhors, plus connu sous le pseudonyme d’Amir DZ, un influenceur algérien exilé en France depuis 2023, connu pour ses critiques virulentes du régime de Tebboune.

Placés en détention provisoire après leur mise en examen, les suspects sont soupçonnés d’avoir agi sur instruction d’Alger. Une hypothèse qui a immédiatement enflammé les relations bilatérales. Le gouvernement algérien a dénoncé une « provocation » et une « violation des accords consulaires », exigeant des excuses officielles — qui ne sont jamais venues.

En représailles, Alger a ordonné dimanche l’expulsion de douze agents français, principalement des fonctionnaires affectés aux services de coopération et de sécurité.

Un nouvel accès de fièvre entre Paris et Alger

Le rappel de l’ambassadeur français intervient dans un contexte déjà délicat. Ces derniers mois, plusieurs dossiers ont cristallisé les tensions : soutien français au plan marocain pour le Sahara occidental, affaires judiciaires concernant des binationaux, ou encore tensions liées à la mémoire coloniale.

« La France est aujourd’hui la cible d’opérations hostiles menées sur son propre sol. Il était impératif de marquer une ligne rouge », a réagi une source diplomatique française. Le ministère de l’Intérieur a également exprimé sa « vive inquiétude » face à ce qu’il qualifie de « tentatives de manipulation d’institutions républicaines à des fins étrangères. »

Côté algérien, le ministère des Affaires étrangères a dénoncé une « riposte disproportionnée » et affirme que Paris « instrumentalise une affaire de droit commun pour s’ingérer dans les affaires internes du pays. »

Une réconciliation mise à mal

Ce nouvel incident vient contrecarrer les efforts récents de normalisation. Fin mars, Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune s’étaient entretenus par téléphone, et une visite du ministre français des Affaires étrangères à Alger, début avril, avait laissé espérer un apaisement progressif.

Difficile désormais de revenir à la table des discussions. « Le dialogue reste possible, mais il passe par des gestes concrets de part et d’autre », confie un diplomate français sous couvert d’anonymat. En attendant, la situation semble figée, et les canaux diplomatiques, eux, momentanément gelés.

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