Ultra-gauche : que sait-on de la Jeune Garde, groupe antifasciste visé par une procédure de dissolution ?

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A flag from the antifascist organization THE YOUNG GUARD LYON flies in the air during a demonstration against fascism and the National Rally party, in Lyon, France, June 28, 2024. (Photo by Matthieu Delaty / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP)

Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a annoncé le 29 avril 2025 l’engagement d’une procédure de dissolution visant la Jeune Garde antifasciste, un collectif d’ultragauche fondé en 2018 à Lyon.

Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a annoncé, lundi 29 avril, l’engagement d’une procédure de dissolution administrative visant la Jeune Garde antifasciste. Ce groupe, né à Lyon en 2018 et actif dans plusieurs grandes villes françaises, est présenté par les autorités comme une organisation d’ultragauche impliquée dans des affrontements violents. Ses membres, eux, revendiquent un « antifascisme de terrain » face à la progression des idées d’extrême droite.

Une mouvance née à Lyon

La Jeune Garde se fait connaître à la fin des années 2010 dans les rues de Lyon, à la faveur de mobilisations antifascistes locales. Ses militants, jeunes pour la plupart, se regroupent alors autour d’un objectif affiché : contrer physiquement la présence des groupuscules identitaires dans l’espace public. Le groupe, qui revendique une cinquantaine de membres actifs à Lyon, s’est depuis implanté à Paris, Strasbourg, Lille ou encore Montpellier.

Inspirée par une tradition marxiste révolutionnaire, la Jeune Garde se définit comme un « collectif de défense populaire antifasciste ». Elle adopte comme emblème les Trois Flèches, symbole des mouvements socialistes opposés au nazisme dans les années 1930. Son cofondateur, Raphaël Arnault, est devenu en 2024 député sous l’étiquette La France insoumise (LFI), après s’être présenté dans le Vaucluse.

Des accusations de violences récurrentes

C’est précisément le positionnement militant du groupe – et les méthodes qu’il emploie – qui justifient aujourd’hui la volonté de dissolution. « Nous ne pouvons tolérer sur notre sol des milices qui font de la violence une méthode politique », a déclaré Bruno Retailleau sur X (ex-Twitter). Le ministère de l’Intérieur évoque une série d’incidents impliquant des membres de la Jeune Garde, dont certains seraient fichés S.

Parmi les faits reprochés, une altercation en 2024 à Lyon au cours de laquelle un adolescent soupçonné d’appartenir à la Ligue de défense juive aurait été violemment pris à partie. Huit militants du groupe ont été mis en examen pour « violences en réunion en raison de la race, de la nation ou de la religion », des accusations que la Jeune Garde réfute. Dans un communiqué, le collectif dénonce un « procès politique » et affirme n’avoir « jamais attaqué quelqu’un en raison de sa religion ».

D’autres heurts avec des militants d’extrême droite, notamment lors de manifestations ou de contre-rassemblements, sont également mis en avant par le ministère pour étayer le dossier de dissolution.

Un climat politique électrique

La tentative de dissoudre la Jeune Garde intervient dans un climat où les affrontements idéologiques et physiques entre extrême droite et antifascistes se sont intensifiés, en particulier à Lyon. Depuis plusieurs années, la préfecture du Rhône est confrontée à des violences entre militants radicaux, sur fond de reconfiguration du paysage militant.

Si la procédure de dissolution suit son cours, elle devrait être présentée prochainement en Conseil des ministres. Elle s’inscrirait dans une série plus large de décisions du gouvernement visant à encadrer les groupes considérés comme extrémistes, après les dissolutions de Génération identitaire en 2021 ou des Soulèvements de la Terre en 2023 (annulée depuis par le Conseil d’État).

« Criminaliser la lutte antifasciste »

La décision de Bruno Retailleau a aussitôt provoqué des réactions à gauche. « Dissoudre un collectif antifasciste pendant que l’extrême droite prospère est un contresens historique », a réagi Manuel Bompard, coordinateur de LFI. Raphaël Arnault, directement visé, dénonce pour sa part une tentative de « criminaliser la lutte antifasciste ».

Pour l’instant, la Jeune Garde reste active sur les réseaux sociaux et dans les manifestations. Le collectif affirme qu’il continuera son combat, quelle que soit l’issue de la procédure.

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