« Conclave »  : Immersion au coeur de la chapelle Sixtine

6 minutes de lecture
« Ralph Fiennes dans le rôle du cardinal Lawrence » - CONCLAVE .dist. : SND © 2024 Focus Features LLC/Conclave Distribution LLC

QUIS FIET PAPA – Après un semi-échec en salle, « Conclave » s’offre une nouvelle jeunesse à l’occasion d’une courte ressortie en salle et en VOD.

Quelques jours après la mort du pape François, le film d’Edward Berger, sorti discrètement fin 2024, attire à lui tous les regards curieux de comprendre les enjeux qui se joueront à huis-clos dans la chapelle Sixtine, à partir du 7 mai prochain.

Adaptation du roman éponyme de Robert Harris, le film raconte de manière dramatique, ce moment rare et solennel : l’élection d’un nouveau souverain pontife à la tête de l’Église.

Un sujet brûlant qui semble déchaîner les passions autant que le film attire de nouveaux spectateurs. Le long-métrage a ainsi bénéficié d’une ressortie en salle pour 3 jours. Quant à la VOD, le film est passé aux États-Unis d’1,8 million de visionnages le 20 avril, à 6,9 millions le lendemain, à l’annonce de décès du pape François. Sur Amazon Prime c’est +283% d’audiences qui ont été enregistrés au cour des derniers jours.

Un film réaliste ?

Bien qu’il soit fictif, le défunt pape du film d’Edward Berger aurait tout aussi bien pu s’appeler François, tant le film dessine des parallèles avec son modèle. Le décès inattendu d’un pape progressiste précipite l’organisation d’un conclave, sous l’œil vigilant du cardinal Lawrence (Ralph Fiennes). Dans la chapelle Sixtine, les cardinaux du monde entier se réunissent pour élire le nouveau successeur de Saint Pierre. Mais alors que deux papabiles se distinguent, les choses se compliquent. Les secrets de certains membres de la curie font surface. Et l’arrivée d’un cardinal inconnu, Vincent Benitez, vient semer le doute au milieu d’une assemblée divisée entre progressistes et conservateurs.

S’il on fait abstraction de sa fin assez improbable, le film s’avère plutôt réaliste dans sa description de l’élection d’un souverain pontife. Il retranscrit assez fidèlement les scissions au sein de l’Église catholique entre sa frange conservatrice et celle progressiste. La manière dont les candidats aux trônes de Saint-Pierre vont se distinguer des autres électeurs. Les dispositifs de sécurité et de confidentialité pour isoler les cardinaux des interférences du monde extérieurs. Et à travers les yeux du personnage de Ralph Fiennes, comme s’organise la période de « sede vancante » et le fameux Conclave.

Une mise en scène soignée…

Au grand désarroi des fans de la franchise Da Vinci Code, ici pas de curé-jedi s’envolant en hélicoptère au dessus de la place Saint Pierre, pour envoyer une bombe atomique dans la stratosphère, avant de redescendre miraculeusement en parachute pour être élue pape par la curie…

Conclave assume sa sobriété. L’intrigue avance lentement, mais tient en haleine jusqu’à ses dernières minutes, multipliant les retournements de situations (souvent attendus). Exit Hans Zimmer, pas de musique envahissante ; exit Ewan McGregor, pas de comédien en surjeu. Edward Berger choisit le réalisme pur, frôlant presque avec le minimalisme. Mais c’est de ce minimalisme que Conclave tire une de ses plus grandes forces : son atmosphère. La mise en scène est solennelle, les couleurs sombres, les décors austères, l’ambiance est lourde frôlant avec le mystique. Fleuretant par moment avec le cinéma de genre dans sa manière de filmer la chapelle Sixtine, ce thriller politique donne la part belle à ses comédiens.

S’il a été salué pour sa tension dramatique, c’est pour les performances des ses acteurs qu’il a été récompensé. Il faut dire que pour cela, le film bénéficiait d’un casting de qualité : Stanley Tucci, Sergio Castellitto, John Lithgow, Isabella Rossellini et bien sûr Ralph Fiennes, bouleversant dans son rôle de doyen de la curie, en proie au doute et à la désillusion.

…mais un scénario poussif

On déplorera toutefois un rythme trop inégal, surtout dans le dernier tiers du film. Celui-ci n’est rythmé que par des twists soit prévisibles, soit grossier, dont la présence désert la crédibilité du récit, rendant son intrigue poussive et artificielle. Il est également dommage que malgré des thématiques centrales aussi fortes que la foi, le deuil, et de la quête de Vérité, le film demeure aussi austère et retenu dans le traitement émotionnel de ses personnages.

Quelle place pour l’Église en 2025 ?

Au-delà de la fiction, il ne faut pas oublier que Conclave parle surtout de notre époque. Il pose des questions simples mais brûlantes : le pouvoir spirituel est-il vraiment dissociable du pouvoir politique ? L’Église est-elle réellement capable d’évoluer face aux défis actuels ? Et surtout, celle qui a fait tant débat à la sortie du film : jusqu’où l’inclusion peut-elle aller au sein de cette institution fondée sur des siècles de dogmes et de traditions ? Tant de questions au cœur de l’actualité, à 7 jours de l’ouverture d’un nouveau conclave.

Partager cet article
Laisser un commentaire