L’Eurovision n’a jamais été étrangère aux tensions politiques, mais rarement l’épreuve aura paru si fragilisée. Après l’Irlande et les Pays-Bas, Madrid a pris position : « Nous devons faire en sorte qu’Israël ne participe pas à la prochaine édition de l’Eurovision et, si nous n’y parvenons pas, l’Espagne ne doit pas prendre part », a déclaré lundi Ernest Urtasun, ministre de la Culture espagnol, sur la radio publique.
Une fronde qui s’étend en Europe
Les diffuseurs publics irlandais et néerlandais avaient ouvert la brèche dès les 11 et 12 septembre, annonçant qu’ils boycotteraient la compétition de Vienne en cas de participation israélienne, invoquant les pertes humaines à Gaza et les violations de la liberté de la presse. La Slovénie et l’Islande se sont jointes à ce front de refus, accentuant la pression sur l’Union européenne de radio-télévision, l’organisatrice du concours.
La télévision publique espagnole, déjà sanctionnée en mai dernier pour avoir diffusé un message de soutien aux Palestiniens juste avant la retransmission du concours, assume son rôle d’aiguillon. « S’agissant des droits de l’homme, le silence n’est pas une option », affichait alors l’écran de RTVE en lettres blanches sur fond noir.
L’UER sous tension
Face à la multiplication des menaces, l’UER se veut neutre. « Il appartient à chaque membre de décider s’il souhaite participer au concours et nous respecterons toute décision », a rappelé son directeur Martin Green. Les diffuseurs ont jusqu’à la mi-décembre pour confirmer leur engagement, délai repoussé précisément afin de laisser le temps à une issue diplomatique.
En Espagne, le Premier ministre Pedro Sánchez s’était déjà prononcé au printemps pour l’exclusion d’Israël de l’Eurovision, « par solidarité avec le peuple de Palestine ». La reconnaissance officielle de l’État palestinien par Madrid, Oslo et Dublin, le 28 mai 2024, a renforcé la posture offensive de ces pays sur la scène européenne.
Un concours aux allures de champ de bataille symbolique
L’édition 2026, qui doit célébrer la 70ᵉ année de l’Eurovision, se trouve désormais menacée par un conflit qui dépasse largement le cadre culturel. En toile de fond, la guerre menée à Gaza, la répression dénoncée contre les journalistes et les accusations de génocide brandies par certains gouvernements nourrissent un climat où la musique sert de caisse de résonance diplomatique.