Le Nobel de la paix 2025 n’ira pas à Donald Trump. Malgré ses déclarations répétées sur son rôle dans la « résolution de nombreux conflits », le président américain a été devancé par une figure inattendue mais unanimement saluée : la Vénézuélienne María Corina Machado. L’opposante de 57 ans, contrainte de vivre dans la clandestinité, a été récompensée pour son engagement « en faveur d’une transition juste et pacifique de la dictature à la démocratie ».
« María Corina Machado est l’un des exemples les plus extraordinaires de courage civique en Amérique latine », a déclaré le président du comité Nobel norvégien, Jørgen Watne Frydnes, en annonçant le nom de la lauréate à Oslo.
Une opposante emblématique de la résistance vénézuélienne
Ancienne députée et cheffe du mouvement Vente Venezuela, María Corina Machado est devenue la figure centrale d’une opposition longtemps divisée. En octobre 2023, elle avait remporté les primaires avec plus de 90 % des voix, une démonstration de force inédite contre le régime Maduro. Son slogan, « Libertad o nada », avait galvanisé des millions de Vénézuéliens épuisés par vingt-cinq ans de chavisme.
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Depuis, celle que ses partisans surnomment la libertadora vit cachée. Elle a refusé l’exil, malgré les menaces, la surveillance et les interdictions de sortie du territoire. « Malgré les graves menaces qui pèsent sur sa vie, elle est restée dans son pays, un choix qui a inspiré des millions de personnes », a souligné le comité Nobel.
Ce prix, attribué alors que le Venezuela traverse une crise humanitaire majeure, marque aussi un signal politique fort. Il rappelle la responsabilité du régime chaviste dans l’effondrement d’un pays autrefois riche, aujourd’hui ravagé par l’hyperinflation et l’exode de ses habitants.
Le rêve brisé de Donald Trump
À Washington, la déception est plus spectaculaire que le suspense. Depuis son retour à la Maison-Blanche en janvier, Donald Trump ne cessait d’évoquer son « mérite » à recevoir le Nobel. Il s’appuyait notamment sur son rôle revendiqué dans le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, signé jeudi, soit trop tard pour être pris en compte par le comité, dont la décision avait été arrêtée dès lundi.
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Mais le président américain n’avait, de toute façon, guère de chances : les nominations étaient closes onze jours après son investiture, et son premier semestre a été marqué par des politiques agressives, de la relance des guerres commerciales à l’envoi de troupes dans plusieurs villes américaines.
Oslo redoute une réaction impulsive
En Norvège, on se prépare déjà à la riposte. « Le comité Nobel est un organe indépendant et le gouvernement norvégien ne participe aucunement à attribuer les prix. Mais je ne suis pas sûr que Trump soit au courant », a ironisé Kirsti Bergstø, la cheffe du Parti socialiste norvégien, citée par The Guardian. « On doit être préparé à tout venant de lui. »
L’inquiétude dépasse les cercles politiques. Le journaliste Harald Stanghelle estime que le président américain pourrait utiliser des représailles économiques ou diplomatiques : hausse des droits de douane, pressions sur l’Otan, voire désignation symbolique de la Norvège comme « nation ennemie ».
Pour l’heure, Donald Trump n’a pas encore commenté la décision. Mais jeudi, à la veille de l’annonce, il avait assuré devant la presse : « Personne dans l’histoire n’a jamais résolu huit guerres en neuf mois. » Une phrase aussitôt tournée en dérision dans les rédactions d’Oslo comme de Washington.