Boby, photographe du désordre : son premier livre « Cafoucho » dévoile quinze ans d’images

Le photographe marseillais publie chez Fisheye Éditions un ouvrage foisonnant, entre chaos visuel et regard social. Tiré d’une archive de trente-trois disques durs, « Cafoucho » condense quinze ans d’un parcours à la frontière du reportage et de l’autoportrait.

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Cafoucho © Boby, Fisheye Editions
Cafoucho © Boby, Fisheye Editions

Le mot évoque un placard mal rangé, une chambre d’adolescent où s’accumulent les trouvailles. « Range ton cafoucho ! », lançait sa mère. De cette injonction provençale est né le titre du premier livre de Boby, photographe aux multiples visages, connu pour ses clichés de manifestations, ses portraits de musiciens ou ses images du Festival de Cannes. Publié par Fisheye Éditions, l’ouvrage rassemble plus de 250 photographies choisies parmi quinze années d’archives.

Un travail titanesque, issu de trente-trois disques durs et d’une pratique instinctive : « Quand tout le monde regarde à droite, j’essaie de regarder à gauche », confie-t-il. Le livre, habillé d’une couverture jaune éclatante – clin d’œil au soleil du Sud, au Ricard et au maillot de l’OM – se présente comme un autoportrait en fragments : un bric-à-brac visuel où se croisent Natalie Portman, Simone Biles ou sa propre grand-mère, immortalisée en train de faire un doigt d’honneur.

Une poésie du désordre

Boby, qui s’était fait connaître sous le pseudonyme d’« Odieux Boby », assume désormais un regard plus intime. « Je loupe plus de photos que tout le monde, mais je loupe aussi celles que j’ai imaginées », dit-il avec humour. Photographe de rue autant que chroniqueur de son époque, il revendique une approche instinctive, entre reportage et improvisation. « Il n’y a pas besoin d’avoir un accès privilégié pour faire de belles photos. Il faut juste de bonnes chaussures et savoir marcher », résume-t-il.

Cafoucho © Boby, Fisheye Editions

À rebours des séries conceptuelles figées, Cafoucho explore la collision des mondes : manifestations et concerts, chantiers et défilés, instants privés et icônes publiques. L’ensemble compose ce qu’il appelle « l’agenda d’une semaine de ma vie », où se côtoient les Jeux olympiques de Paris 2024 et une scène domestique du Sud.

Un succès éditorial et communautaire

Lancé sur la plateforme Ulule au printemps 2025, le projet a dépassé toutes les attentes : plus de 1 500 exemplaires prévendus, soit un financement à 302 %. Chaque palier de la campagne a permis d’ajouter une exposition, puis une tournée de dédicaces. Publié en juin, le livre a été accompagné d’une « Boby Week » à la Fisheye Gallery, ponctuée de rencontres et de projections.

Cafoucho © Boby, Fisheye Editions

Fisheye Éditions, qui publie chaque année une dizaine d’ouvrages de photographie contemporaine, en fait une figure emblématique d’une nouvelle génération d’auteurs hybrides : entre reportage social, culture pop et narration personnelle. Le volume est enrichi de textes signés Benoît Baume, fondateur du magazine, de Tess Raimbeau, iconographe à Libération, et des musiciens Oli (Bigflo & Oli) et Liliboy du groupe Deluxe, proches du photographe.

En mêlant l’intime et le spectaculaire, Boby signe un manifeste pour une photographie libre, ancrée dans la vie quotidienne et dénuée de hiérarchie. Cafoucho, c’est le désordre d’un monde saisi dans toute sa vitalité, à la fois tendre, ironique et profondément humain.

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Après des études en Affaires Publiques et à HEC Montréal, Timothé devient journaliste pigiste. Il collabore avec de nombreux médias français depuis Montréal.
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