Coup de coeur de la rédaction : « Le GIGN par ceux qui l’ont commandé » : cinquante ans d’héroïsme et d’humilité

De Christian Prouteau à Ghislain Réty, douze commandants racontent leur GIGN dans un livre exceptionnel dirigé par Pierre-Marie Giraud. Un récit d’action et d’humanité, à la fois manuel de courage et méditation sur le sens du service.

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Le GIGN par ceux qui l'ont commandé
Le GIGN par ceux qui l'ont commandé - Editions Mon Poche

C’est un ouvrage qu’on referme avec un respect silencieux. Le GIGN par ceux qui l’ont commandé (Mon Poche) réunit pour la première fois la parole des douze patrons de l’unité d’élite de la gendarmerie nationale, de 1974 à nos jours. Christian Prouteau, Philippe Legorjus, Denis Favier ou encore Laurent Phélip : chacun raconte, avec ses mots, les opérations, les doutes et les sacrifices qui ont façonné un demi-siècle d’histoire. Sous la plume du journaliste Pierre-Marie Giraud, ancien de l’AFP, ces récits composent un tableau saisissant de ce que la France compte de plus noble dans son armée de paix.

Ce livre n’est pas une compilation d’exploits, mais un hommage à une philosophie : celle d’hommes « engagés pour la vie ». Car c’est là la devise du GIGN, rappelée par Denis Favier dans les premières pages : « sauver des vies, parfois au péril de la sienne, toujours avec un respect absolu de la vie ».

Des hommes avant des héros

Le lecteur découvre d’abord des soldats profondément humains. Derrière les images d’assaut et les silhouettes cagoulées, ces pages racontent des pères de famille, des chefs confrontés à la peur et à la responsabilité de leurs hommes. On y croise les pionniers de l’unité, dix-sept volontaires réunis par le lieutenant Prouteau en 1974, après le drame olympique de Munich. On y lit aussi la modernisation progressive d’une structure devenue, cinquante ans plus tard, un groupe de mille gendarmes menant près de huit missions par jour à travers le monde.

Les témoignages sont souvent bouleversants. Denis Favier revient sur l’assaut de Marignane, ce 26 décembre 1994, quand ses hommes ont libéré les 173 passagers d’un Airbus d’Air France pris en otage par un commando islamiste. Il raconte « la puissance du collectif », ce moment où « chacun sait que son initiative peut faire basculer la mission ». Ces lignes, sobres et précises, donnent à sentir la tension physique du combat, mais aussi la fraternité qui lie ces hommes.

Une éthique du sang-froid

Ce qui frappe à la lecture, c’est l’unité morale de ces douze récits. Tous parlent de maîtrise, de mesure, de refus de la haine. Pierre-Marie Giraud le résume dans un mot : « respect ». Respect de la vie, de l’adversaire, du mandat républicain. Dans les interventions du GIGN, il n’est jamais question de “tuer l’ennemi” mais de “neutraliser l’adversaire”. Une nuance essentielle, expliquée dans le livre comme une ligne rouge absolue. « L’objectif n’est pas de détruire, mais de ramener à la raison », confie l’un des anciens commandants.

Cet équilibre entre rigueur militaire et empathie humaine confère au livre une force rare. À travers les époques, des forcenés retranchés dans une ferme aux attentats de 2015, on mesure l’évolution des menaces, mais aussi la constance des valeurs. Tous évoquent cette exigence de sang-froid, cette discipline intérieure qui fait du GIGN une école de commandement autant qu’un bouclier de la nation.

Un récit d’action et de transmission

Pierre-Marie Giraud signe ici plus qu’un document historique : un livre de transmission. Son ton est juste, sans emphase, et l’on sent la confiance que les anciens chefs lui ont accordée. Les révélations sur certaines opérations, longtemps couvertes par le secret-défense, ne cherchent pas le sensationnel. Elles restituent, au contraire, la grandeur tranquille d’une unité qui a toujours préféré le silence à la gloire.

Dans un monde saturé d’images et de slogans, Le GIGN par ceux qui l’ont commandé rappelle ce que signifie servir. Ces pages respirent la pudeur et l’honneur. On referme l’ouvrage avec l’impression d’avoir approché quelque chose de rare : la France qui tient debout.

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Après des études en Affaires Publiques et à HEC Montréal, Timothé devient journaliste pigiste. Il collabore avec de nombreux médias français depuis Montréal.
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