Il aura suffi de quarante-huit heures pour transformer une opération de survie en triomphe. Lundi 3 novembre, à 8 heures, la plateforme Lita ouvrait la levée de fonds de Duralex. Deux jours plus tard, plus de 20 millions d’euros d’intentions d’investissement étaient enregistrés, dépassant largement l’objectif initial fixé à 5 millions. « On espérait boucler en un mois », confie François Marciano, directeur général de la Scop Duralex. « Mais les Français ont répondu présents, bien au-delà de nos attentes. »
La verrerie de La Chapelle-Saint-Mesmin (Loiret), reprise par ses 243 salariés à l’été 2024 après une série de faillites, retrouve ainsi une seconde jeunesse. Devenue société coopérative (Scop), elle a choisi de s’adresser directement aux particuliers pour financer ses nouveaux moules, moderniser ses machines et développer une ligne de bocaux pour la moutarde Martin-Pouret, autre fleuron orléanais.
Une levée « citoyenne » portée par l’émotion et la nostalgie
L’opération, ouverte à partir de 100 euros, proposait un rendement attractif : 8 % par an pendant sept ans, assorti d’une réduction d’impôts de 18 %. Un placement risqué, mais symboliquement fort. « Les Français ont voulu sauver une part de leur mémoire collective », résume l’économiste Olivier Passet, spécialiste de l’industrie.
À l’usine, l’émotion était palpable. « On est sur un nuage », confie Muriel Joron, cheffe de produit récemment embauchée. « Cet argent va nous permettre d’innover et d’attirer une nouvelle génération de consommateurs. » Suliman El-Moussaoui, employé depuis dix-huit ans, partage le même enthousiasme : « C’est la preuve que notre combat a un sens. »
Un symbole du « made in France » réinventé
Ce plébiscite populaire, observé aussi sur le stand de Duralex au Salon du Made in France, traduit une fierté retrouvée pour l’industrie tricolore. « Dans les années 1980, la France comptait 25 % d’industrie, contre à peine 9 % aujourd’hui. Les Français veulent inverser la tendance », analyse François Marciano.
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L’entreprise prévoit déjà de consacrer ces fonds à la modernisation de ses lignes de production et à la diversification de son catalogue : gobelets redessinés, gammes de conservation, ustensiles de cuisine et collaborations avec des marques partenaires comme Le Slip Français, La Poste ou encore l’Élysée. Duralex vise désormais un chiffre d’affaires de 35 millions d’euros d’ici 2027, contre 33 millions attendus cette année, seuil qui marquerait son retour à l’équilibre.
Une aventure industrielle à part
La Scop, qui fête ses 80 ans, fonctionne selon le principe « un salarié, une voix ». Soixante pour cent des employés sont aujourd’hui associés. Ce modèle démocratique et solidaire nourrit une ferveur collective rare dans l’industrie. « On relève un défi industriel et humain », conclut François Marciano.
Incassable, Duralex semble bien décidée à le rester.


