Cláudio Castro, l’homme fort de Rio qui mise sur la poigne et la foi

À la tête de l’État de Rio de Janeiro depuis 2021, Cláudio Castro revendique une ligne sécuritaire sans compromis. Soutien affiché de Jair Bolsonaro, il a défendu l’opération “Contenção”, qui a fait plus de 120 morts à Rio, comme “nécessaire à la reconquête du territoire”. Portrait d’un gouverneur populiste et religieux, devenu le visage d’une droite brésilienne autoritaire.

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Alors que Rio de Janeiro est encore sous le choc du raid policier le plus meurtrier de son histoire, le nom de Cláudio Castro s’impose au centre des débats. C’est lui qui a ordonné, mardi, l’intervention des 2 500 agents déployés dans les favelas d’Alemão et de Penha, où plus de 120 personnes ont trouvé la mort. L’opération, présentée comme une offensive contre le gang du Comando Vermelho, a rapidement viré au drame. Mais loin de reculer, le gouverneur a salué une “victoire contre le narcoterrorisme”, rejetant toute accusation de bavure. Pour ses soutiens, Castro incarne “le courage politique face au crime”. Pour ses détracteurs, il symbolise une dérive autoritaire où la sécurité publique se confond avec une logique de guerre.

« Dieu, famille et sécurité »

Fils d’un musicien et ancien séminariste évangélique, Cláudio Castro s’est hissé au pouvoir en 2021 à la faveur d’un scandale de corruption ayant entraîné la destitution de son prédécesseur. Depuis, il s’est imposé comme l’une des figures les plus influentes de la droite brésilienne. Réélu en 2022 sous l’étiquette du Parti libéral, le même que Jair Bolsonaro, il gouverne en conjuguant ferveur religieuse et politique de poigne, dans un État gangrené par le crime et miné par les inégalités.

Son style tranche avec celui des technocrates de Brasilia : proche des églises évangéliques, amateur de musique gospel, Castro revendique sa foi comme boussole politique. Il séduit les milieux populaires avec un discours simple : « Dieu, famille et sécurité ». Son gouvernorat se fonde sur une ligne dure en matière de criminalité : multiplication des raids policiers dans les favelas, hausse du budget sécuritaire et rhétorique martiale. Ses partisans le décrivent comme un homme « du terrain », tandis que ses détracteurs dénoncent un usage excessif de la force et une instrumentalisation des opérations pour asseoir son autorité.

Le continuateur du bolsonarisme carioca

Cláudio Castro incarne la continuité du courant bolsonariste au niveau local. Réélu en 2022 sous la bannière du Parti Libéral (PL), le même que Jair Bolsonaro, il s’est affiché à plusieurs reprises aux côtés de l’ancien président, notamment lors de meetings sécuritaires et de campagnes contre « le crime et la corruption ». Son électorat, très fidèle, mêle policiers, militaires, pasteurs évangéliques et commerçants de la périphérie. Castro partage avec Bolsonaro une vision ultra-centralisée du pouvoir, hostile aux ONG et méfiante envers les médias.

Sous son mandat, la politique de sécurité publique a pris une tournure radicale : l’État de Rio a battu des records d’interventions armées dans les favelas, souvent au prix de bilans humains dramatiques. L’opération « Contenção », menée fin octobre et ayant fait plus de 120 morts, illustre ce tournant sécuritaire. Le gouverneur a parlé d’une « guerre nécessaire » contre le narcotrafic, malgré les critiques des associations de défense des droits humains. Cette ligne de fermeté lui vaut une popularité solide auprès d’une partie de la population excédée par la violence, mais elle inquiète les partenaires internationaux et les autorités fédérales.

Un poids lourd politique désormais incontournable

À 46 ans, Castro s’impose comme un acteur clé de la droite brésilienne. Ambitieux, il cultive des liens étroits avec les gouverneurs du Sud et du Centre-Ouest, cherchant à bâtir un front conservateur face au président Lula. Son profil de gouverneur « efficace », prompt à annoncer des résultats visibles, routes rénovées, primes aux policiers, aides ciblées aux églises, nourrit les rumeurs d’une future candidature nationale.

Pour autant, son image reste contrastée : certains le voient en homme providentiel capable de « restaurer l’ordre », d’autres en politicien opportuniste surfant sur la peur. Son style, mêlant populisme religieux et autoritarisme assumé, résume la fracture du Brésil contemporain. Dans les collines de Rio, où les blindés succèdent aux processions, Cláudio Castro gouverne un État à l’image de lui-même : fervent, fracturé et sous tension permanente.

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