Port-au-Prince n’a pas été directement frappée par l’œil du cyclone, mais les rafales et pluies torrentielles qui se sont abattues sur Haïti les 27 et 28 octobre ont submergé plusieurs départements. Selon les premiers bilans compilés par la Protection civile, au moins 49 personnes ont péri et une cinquantaine sont portées disparues. Les rivières Gonâve et La Digue sont sorties de leur lit, entraînant la destruction de centaines d’habitations.
Le gouvernement haïtien a décrété l’état d’urgence pour un mois dans quatre départements du sud du pays, alors que près de 40 000 personnes ont été contraintes d’évacuer. Le Premier ministre par intérim Garry Conille a appelé la communauté internationale à « agir rapidement » pour éviter une « crise humanitaire majeure ».
Des infrastructures déjà fragiles emportées par les eaux
La tempête, qui avait atteint la catégorie 5 avant de toucher la Jamaïque puis Cuba, a accentué les vulnérabilités structurelles du pays. Routes coupées, réseaux électriques hors service et hôpitaux débordés : le système haïtien d’urgence montre ses limites.
« Nous avons perdu le contact avec plusieurs communes du Sud-Est », a reconnu Emmanuel Pierre, directeur général de la Protection civile, cité par Le Monde. Dans la région de Petit-Goâve, des glissements de terrain ont enseveli plusieurs quartiers. À Jacmel, la montée rapide des eaux a emporté le marché central et contaminé les points d’eau.
Les équipes locales, appuyées par la Croix-Rouge et le Programme alimentaire mondial, peinent à atteindre certaines zones enclavées. Le PAM estime que plus de 100 000 personnes auront besoin d’une aide d’urgence dans les prochains jours. Selon Reuters, le stock humanitaire prépositionné à Port-au-Prince ne permet de couvrir que 15 % des besoins immédiats.
Un pays au bord de la rupture
Haïti affrontait déjà une situation explosive avant la tempête : inflation supérieure à 30 %, insécurité chronique et près de six millions d’habitants en insécurité alimentaire aiguë, selon les Nations unies. Melissa aggrave cette spirale.
« C’est une crise dans la crise », résume un représentant du Bureau de coordination humanitaire de l’ONU à Radio-Canada. « Le pays n’a plus de marges logistiques ni financières pour répondre seul. »
Les économistes redoutent un effondrement supplémentaire du PIB, déjà en recul de 3,8 % en 2024. Les récoltes de café, de maïs et de riz du sud du pays, principales sources de revenus agricoles, ont été « quasiment détruites », selon le ministère de l’Agriculture.
Sur place, les habitants s’organisent comme ils peuvent. À Léogâne, Jean-Marc Charles, un enseignant, décrit à l’AFP « une ville défigurée » : « Les écoles sont inondées, les routes sont des rivières, et personne ne sait quand l’aide viendra. »


