François Bayrou défend l’usage du mot « islamophobie » après le meurtre d’un fidèle musulman dans une mosquée du Gard. Ce choix ravive un débat politique clivant sur la manière de nommer la haine antimusulmane en France.
Le Premier ministre François Bayrou s’exprime sans détour. Dans un entretien au Journal du Dimanche, il qualifie d’islamophobie le meurtre survenu la semaine dernière dans une mosquée du Gard. Un homme de 22 ans a été assassiné pendant qu’il priait, tandis que son agresseur filmait la scène en proférant des insultes contre Allah.
« Si ce n’est pas de la haine contre l’islam, qu’est-ce que c’est ? », interroge Bayrou. Il appelle à regarder la réalité en face et à ne pas « refuser les mots justes ».
La droite rejette toujours le mot « islamophobie »
Ce mot reste tabou dans une grande partie de la droite. Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, pressenti pour prendre la tête des Républicains, explique qu’il évite ce terme dans son ministère. Pour lui, l’islamophobie est associée à une idéologie, notamment aux Frères musulmans. La droite préfère parler d’attaque contre un musulman ou de haine antimusulmans, des expressions jugées plus neutres.
À gauche, le terme s’impose progressivement
La gauche française a longtemps hésité. En 2019, Jean-Luc Mélenchon déclarait qu’il préférait parler de « haine des musulmans », estimant que le mot islamophobie brouillait la critique des religions. Depuis, les Insoumis ont changé de ligne. L’eurodéputée Rima Hassan a dénoncé cette semaine ceux qui « noient le sujet dans des acrobaties sémantiques ».
Pour autant, le mot ne fait pas l’unanimité. Jérôme Guedj, député socialiste, y voit un concept « pernicieux » qui pourrait servir à remettre en cause les lois laïques. Fabien Roussel, patron du Parti communiste, continue quant à lui de parler de « haine anti-musulmans ».
Nommer la haine religieuse, un impératif pour Bayrou
Dans son entretien au Journal du Dimanche, François Bayrou élargit son propos. Il évoque une montée générale de la haine religieuse : « Je vois la détestation des musulmans, des juifs et des chrétiens. Avec des crimes dans les trois cas. » Pour lui, cette violence doit être nommée clairement, sans peur des mots.
Alors que l’enquête se poursuit dans le Gard, le débat sur la sémantique reflète un enjeu plus large : celui du regard politique porté sur les actes de haine.