La “taxe Zucman” arrive à l’Assemblée nationale avec une version allégée

Portée par la gauche, la contribution minimale sur les très hauts patrimoines est examinée ce vendredi. Le gouvernement refuse un passage en force, la droite promet la bataille, et la majorité tente d’éviter un nouveau psychodrame budgétaire.

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taxe zucman

C’est l’un des moments-clés de la séquence budgétaire. Les députés ouvrent, ce vendredi 31 octobre, le chapitre le plus inflammable du débat fiscal avec l’examen de la “taxe Zucman”, inspirée des travaux de l’économiste Gabriel Zucman. Le texte mis à l’ordre du jour n’est pas l’orthodoxie initiale, mais une mouture “allégée” négociée par les socialistes pour tenter d’agréger une partie du bloc central sans fracturer davantage l’hémicycle.

Dans sa trajectoire politique, la mesure a déjà connu des allers-retours. Une première proposition, déposée en janvier, avait été adoptée en première lecture à l’Assemblée puis retoquée au Sénat. Le retour en séance ce vendredi s’opère dans un contexte électrique, après plusieurs votes surprises sur d’autres sujets fiscaux qui ont rebattu les cartes au Palais-Bourbon.

Ce que contient la version “allégée”

Le cœur du dispositif reste le principe d’une contribution minimale assise sur le patrimoine net des ultra-riches, avec un taux de référence de 2%. Mais la copie présentée ce vendredi exclut des catégories de biens professionnels et vise à sécuriser l’assiette pour limiter les effets de bord et le risque contentieux. Objectif affiché par ses promoteurs : cibler les patrimoines les plus élevés tout en rassurant les actifs entrepreneuriaux.

Pour ses partisans, l’enjeu est autant politique que budgétaire : envoyer un signal de “justice fiscale” dans un moment où l’exécutif cherche à contenir le déficit. À droite, LR et le RN dénoncent une “surenchère fiscale” et un message délétère pour l’investissement. La majorité, elle, insiste sur la nécessité d’une coordination internationale, sur le modèle de l’impôt minimum sur les multinationales, afin d’éviter les stratégies d’optimisation et les fuites d’assiette.

Une journée à hauts risques pour l’exécutif

L’examen de la taxe intervient alors que la partie recettes du budget 2026 est déjà chahutée. Matignon martèle qu’aucune mesure isolée ne sera retenue sans cohérence d’ensemble et que la diplomatie fiscale prime sur les gestes symboliques. Bercy agite le spectre d’une instabilité juridique si Paris légifère seul, tandis que les groupes de gauche pressent le gouvernement d’assumer un marqueur fort en période d’arbitrages douloureux.

Politiquement, la séquence vaut test grandeur nature pour la majorité : chaque vote peut devenir révélateur des fractures internes et reconfigurer des alliances volatiles. À l’approche des échéances électorales, la gauche entend capitaliser sur un sujet populaire dans l’opinion, quand la droite veut faire du “coût France” l’axe d’attaque prioritaire. Le risque pour l’exécutif : que la bataille symbolique sur la “taxe Zucman” vampirise le reste de la discussion budgétaire.

Au-delà de l’issue du scrutin, le débat remet sur la table la faisabilité d’une norme commune pour les très hauts patrimoines. Les promoteurs du dispositif plaident un alignement progressif européen, avec un calendrier et des garde-fous techniques, afin d’assurer le rendement et l’équité du prélèvement. Les opposants y voient, au contraire, une usine à gaz difficilement applicable, susceptible d’alimenter les délocalisations de résidences fiscales.

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