Depuis son ouverture à Albi, le procès Jubillar multiplie les rebondissements. L’homme de 38 ans, peintre-plaquiste, continue de nier toute implication dans la disparition de son épouse, survenue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 à Cagnac-les-Mines. Mais les débats ont pris un tour inattendu cette semaine, quand un gendarme a reconnu à la barre avoir commis une « erreur de copier-coller » dans les relevés téléphoniques liés à l’amant de Delphine. Un aveu embarrassant, qui jette une ombre sur la solidité de l’enquête.
La défense s’est aussitôt engouffrée dans la brèche, accusant les enquêteurs d’avoir « altéré la procédure ». Selon Me Emmanuelle Franck, un procès-verbal mentionnant la ligne de l’amant aurait été retiré du dossier. L’intéressé, Donat-Jean M., un expert automobile rencontré par Delphine sur un site de rencontres extraconjugales, nie toute présence à Cagnac cette nuit-là. Mais selon les avocats de la défense, son téléphone aurait borné près du domicile du couple. Un « faux coup de théâtre », répondent les parties civiles, dénonçant une diversion destinée à semer le doute dans l’esprit des jurés.
Des contradictions en série
Dans cette affaire sans corps ni aveux, chaque détail devient une pièce d’un puzzle instable. La voiture de Delphine, garée selon plusieurs témoins dans un sens inhabituel le lendemain de sa disparition, reste un point d’interrogation. « Si j’ai tué ma femme, j’aurais fait la bêtise de garer le véhicule dans le mauvais sens ? » s’est emporté Cédric Jubillar, visiblement irrité. L’accusé, d’ordinaire placide, s’est montré plus fébrile à mesure que les contradictions s’accumulaient.
Le témoignage de son fils Louis, âgé de 6 ans au moment des faits, a aussi pesé lourd. L’enfant a affirmé avoir entendu une dispute entre ses parents ce soir-là, et des cris peu avant de s’endormir. « Arrête-toi », aurait lancé Delphine à son mari. L’accusé, lui, parle d’une confusion : « Nous nous sommes déjà disputés, mais pas ce soir-là. »
À la barre, une voisine a confirmé avoir perçu des « cris de peur » et des « couinements de chien » peu avant minuit. D’autres habitants ont évoqué l’attitude « moqueuse » du mari dans les jours suivant la disparition. Autant d’éléments que la défense juge « interprétés », mais qui contribuent à renforcer la conviction d’un climat conjugal explosif.
Nadine Jubillar, la mère de Cédric vacille
Le procès a pris une tournure plus intime lorsque la mère de l’accusé, Nadine Jubillar, a été appelée à témoigner. Longtemps persuadée de l’innocence de son fils, elle a fini par admettre ses doutes : « Je culpabilise. J’aurais dû lui dire de dire la vérité. » Une phrase lourde, prononcée dans un silence glacé. « Je découvre que je ne connais pas mon fils », a-t-elle ajouté, bouleversée.
Les enfants du couple, Louis et Elyah, aujourd’hui âgés de 10 et 6 ans, sont absents du prétoire. Placés chez leur tante, ils restent au cœur de toutes les attentions. « Tout ce que je veux, c’est la vérité pour eux », a confié Nadine, la voix brisée.
Un verdict encore lointain
Alors que la cour d’assises du Tarn entre dans sa dernière ligne droite avant le verdict prévu le 17 octobre, l’affaire Jubillar reste une énigme judiciaire. Les avocats de la défense espèrent que les failles de l’enquête pèseront en faveur de leur client. Les parties civiles, elles, rappellent qu’au-delà des zones d’ombre, il y a une femme disparue et deux enfants privés de leur mère.
Cinq ans après la nuit de Cagnac-les-Mines, le mystère Jubillar ne faiblit pas. Il s’épaissit.