À quelques jours de la COP30 organisée à Belém, au Brésil, le constat dressé par le Global Carbon Project ravive la fracture entre ambitions climatiques et trajectoire réelle des émissions. Le consortium scientifique, qui rassemble près de 130 chercheurs, prévoit que les rejets de CO₂ venant des énergies fossiles atteindront 38,1 milliards de tonnes en 2025, soit une hausse de 1,1 % sur un an. Le rythme dépasse la moyenne de la dernière décennie, située à 0,8 % par an, et s’inscrit dans une tendance ascendante que ni la montécop30e des renouvelables ni l’électrification partielle des usages ne parviennent à compenser.
Depuis l’Accord de Paris, les émissions fossiles ont progressé de 10 %, alors que les États s’étaient engagés à contenir le réchauffement entre 1,5 °C et 2 °C. Pour Glen Peters, chercheur au Centre international pour la recherche sur le climat, « collectivement, le monde n’est pas à la hauteur », malgré les efforts nationaux engagés par certains pays pour réduire la part des combustibles fossiles.
Le charbon repart, le pétrole et le gaz poursuivent leur progression
Derrière le chiffre global, l’évolution des trois grands combustibles fossiles dessine une dynamique contrastée mais orientée à la hausse. Le charbon, malgré les engagements répétés de sortie progressive, devrait atteindre un nouveau maximum en 2025, avec une hausse estimée à 0,8 %. Les États-Unis et l’Inde tirent une partie de cette augmentation, notamment sous l’effet d’hivers plus rigoureux et d’une demande énergétique soutenue.
Le pétrole reste lui aussi sur une trajectoire ascendante, avec une hausse de 1 % attendue cette année, portée notamment par les transports. Le gaz repart de plus belle, progressant de 1,3 %. L’étude souligne que les émissions gazières « semblent revenir à la tendance de croissance persistante qui prévalait avant l’invasion russe de l’Ukraine », effaçant ainsi le ralentissement temporaire observé en 2022 et 2023.
États-Unis et Union européenne en hausse, Chine en plateau incertain
Les émissions américaines devraient augmenter de 1,9 % en 2025, rompant avec plusieurs années de baisse portée par la substitution charbon-gaz et par la montée du solaire et de l’éolien. Dans l’Union européenne, la trajectoire redevient légèrement positive, +0,4 %, sous l’effet combiné d’une reprise de la demande de chauffage et d’une activité industrielle irrégulière.
La Chine, premier émetteur mondial, voit ses émissions se stabiliser (+0,4 %). Les chercheurs restent toutefois prudents sur l’hypothèse d’un pic durable, compte tenu des incertitudes entourant la politique énergétique chinoise, encore marquée par des investissements massifs dans les centrales à charbon, parallèlement à une expansion rapide des renouvelables.
Un budget carbone presque épuisé pour 1,5 °C
Le Global Carbon Project rappelle que le « budget carbone » restant pour maintenir le réchauffement sous 1,5 °C n’est plus que de 170 milliards de tonnes de CO₂. À rythme d’émissions constant, ce seuil serait atteint en quatre ans. « C’est, en pratique, impossible de limiter le réchauffement à 1,5 °C », estime Pierre Friedlingstein, climatologue à l’université d’Exeter et coordinateur de l’étude.
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L’enjeu se déplace désormais vers la durée du dépassement. Les climatologues, comme l’ONU, évoquent l’objectif d’un dépassement « temporaire », mais admettent qu’il pourrait durer plusieurs décennies. Sur la base des politiques actuelles, le monde se dirige vers une hausse des températures comprise entre 2,3 °C et 2,5 °C à la fin du siècle.


