Procès des revenantes de Daech : entre aveux et regrets à la barre

Trois femmes soupçonnées d’avoir rejoint l’État islamique en Syrie, dont la nièce des frères Clain, comparaissent depuis lundi devant la cour d’assises spéciale de Paris. Les accusées, âgées de 34 à 67 ans, encourent trente ans de réclusion criminelle.

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Au procès des revenantes de Daech, Jennyfer Clain et deux proches comparaissent à Paris pour avoir rejoint l’État islamique en Syrie.
Au procès des revenantes de Daech, Jennyfer Clain et deux proches comparaissent à Paris pour avoir rejoint l’État islamique en Syrie.

Dans le box, les regards se baissent, parfois s’embuent. Jennyfer Clain, 34 ans, nièce des frères Clain qui avaient revendiqué les attentats du 13 novembre 2015, est jugée aux côtés de sa belle-mère Christine Allain, 67 ans, et de sa belle-sœur par alliance, Mayalen Duhart, 42 ans. Toutes trois sont accusées d’avoir rejoint l’organisation État islamique entre 2014 et 2017 et d’y avoir élevé leurs enfants dans le « califat » de Rakka.

Dès l’ouverture du procès, Jennyfer Clain a reconnu sa culpabilité. « Je ne suis pas là pour nier les faits qui me sont reprochés. J’ai adhéré à ce groupe terroriste, tueur. Je suis coupable. Je regrette tellement, mais je ne peux pas revenir en arrière », a-t-elle déclaré d’une voix émue. La jeune femme a expliqué que son départ à 16 ans, pour épouser Kevin Gonot, membre de Daech aujourd’hui condamné à la perpétuité en Irak, n’avait jamais été véritablement un choix libre.

Des parcours marqués par l’emprise familiale

Les magistrats ont insisté sur la dimension clanique de cette affaire. La famille Clain, originaire de Toulouse, est au cœur d’une filière djihadiste déjà connue de la justice antiterroriste. Christine Allain, ancienne éducatrice spécialisée, s’est convertie à l’islam sous l’influence de son fils, Thomas Collange, avant d’embrasser un rigorisme qui l’a conduite jusqu’en Syrie.

Mayalen Duhart, elle, raconte s’être convertie par amour. « Très rapidement, il m’a annoncé que je devais me convertir. Moi, je n’arrivais pas à faire ma vie sans lui », a-t-elle confié à la barre. Si elle comparaît libre sous contrôle judiciaire, son récit n’a pas atténué la sévérité des accusations : les juges lui reprochent d’avoir exposé ses quatre enfants à une zone de guerre.

Entre repentir affiché et doutes persistants

Les trois femmes affirment aujourd’hui avoir rompu avec l’idéologie djihadiste. Jennyfer Clain insiste sur le chemin parcouru depuis son incarcération : études de psychologie en prison, rupture avec son mari resté en Irak, participation à des concours littéraires. « Sans Daech, je serais encore dans cette idéologie sectaire. Je regrette, mais c’est ce qui a fait que je suis la personne que je suis aujourd’hui », a-t-elle confié aux juges.

Pour Christine Allain, le ton est plus ambigu. La sexagénaire reconnaît avoir été prosélyte mais affirme avoir cessé de l’être. « Quand je découvre quelque chose de bien, je veux absolument le partager », a-t-elle admis, laissant transparaître un attachement persistant à une vision rigoriste de sa foi.

Les juges devront déterminer si ces « revenantes » disent vrai lorsqu’elles affirment avoir rompu avec le passé. « Leur défense emprunte un chemin aussi fin qu’un cheveu et aussi acéré que la lame d’une épée », a résumé l’un des avocats. Le procès doit se poursuivre jusqu’au 26 septembre.

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